Les législations nationales et européennes couplées aux décisions jurisprudentielles des cours et tribunaux constituent un facteur déterminant dans les relations entre les groupes laïques et religieux. Dans cette proposition de communication, je souhaiterais analyser l'influence de ce phénomène sur la place de ces acteurs dans la vie publique.
Depuis la loi du 9 décembre 1905 instituant la séparation des Églises et de l'État, la France s'évertue à chercher un équilibre entre neutralité et respect absolu de la liberté de pensée, de conscience et de religion de chacun. Néanmoins, les récents évènements (débats sur la laïcité, lutte contre le terrorisme, bioéthique ou encore séparatisme) ont conduit le législateur français, sous l'influence de certains lobbies et politiques publiques, à l'adoption de certaines lois qui ne sont pas sans conséquence sur les intérêts de certains acteurs religieux et laïques. Ainsi, la loi du 15 mars 2004 encadrant le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les établissements scolaires, celle du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public ou plus récemment la loi du 24 août 2021 sur le séparatisme imposent des contrôles de plus en plus stricts aux associations cultuelles et aux lieux de cultes. Si ces lois, au regard de leurs conséquences, affectent assurément la place des acteurs religieux dans la vie publique, des mécanismes et des garanties existent afin de maintenir un certain équilibre.
Dans l'ordre français d'abord, le Conseil constitutionnel, régulateur de l'activité des pouvoirs publics, opère régulièrement des contrôles afin de s'assurer de la conformité des lois à la Constitution. Ainsi, concernant l'interdiction de dissimuler son visage dans l'espace public, les sages de la rue Montpensier ont déclaré qu'une telle interdiction ne pouvait s'appliquer dans les lieux de culte ouverts au public afin de ne pas porter une atteinte excessive à la liberté religieuse.
À l'échelle européenne, la jurisprudence strasbourgeoise influence elle aussi la place des acteurs religieux et laïque dans la vie publique. Ainsi, dans un célèbre arrêt du 25 mai 1993, la Cour européenne des droits de l'Homme déclarait déjà que la liberté de pensée, de conscience et de religion telle qu'elle figure à l'article 9 de la Convention européenne représente l'une des assises d'une société démocratique. À partir de cette définition, une jurisprudence abondante se développera en faveur du respect de la vie religieuse et les condamnations adressées par la Cour européenne à l'égard de certaines législations nationales jugées trop restrictives renforceront la place des acteurs religieux dans la vie publique.
Voilà résumés l'ensemble des facteurs juridiques qui affectent la place des acteurs religieux et laïques dans la vie publique. Au-delà de ce constat, de nombreuses interrogations demeurent : les législations assurent-elles un véritable équilibre entre les acteurs religieux et laïques ? Les mécanismes permettant d'assurer cet équilibre sont-ils suffisants ? Dans quelle mesure les lobbies influencent-ils les politiques publiques ?
Biographie
Diplômé le 1er avril 2024 d'un doctorat en droit des Universités de Bordeaux et de Sherbrooke, je travaille actuellement sur l'incrimination du blasphème et le militantisme religieux (COLIBEX).